Poutine convoiterait-il la Biélorussie ?

Le président russe Vladimir Poutine envisagerait-il d’absorber la Biélorussie pour rester au pouvoir après la fin de son mandat actuel, dans 5 ans ? C’est ce qu’affirme Bloomberg. D’après lui, la Russie a exigé une plus grande intégration à la Biélorussie, en échange de la poursuite de son aide économique. L’incorporation de la Biélorussie créerait un nouvel Etat, et la Constitution russe actuelle, qui interdit à Poutine de se représenter à la présidence en 2024, ne s’appliquerait donc plus. 

C’est le scénario qui aurait été décrit par 3 personnes proches du Kremlin. Le président  biélorusse, Alexandre Loukachenko, est invité à témoigner une plus grande loyauté à l’égard de la Russie, et à accepter une intégration plus profonde avec ce pays. En cas de refus, il s’expose à une réduction importante des subventions que la Russie accorde à son pays.

La Russie a versé des milliards de dollars d’aides à la Biélorussie

Apparemment, à Minsk, on redoute que ces nouvelles pressions ne soient que le prélude à une possible annexion. La Russie a investi des milliards de dollars dans l’économie biélorusse ces dernières années, et selon ces 3 initiés, Poutine se montrerait de plus en plus impatient envers Loukachenko. Il craindrait que la Biélorussie n’échappe à l’influence russe.

Récemment, l’ambassadeur de Russie en Biélorussie a établi un lien entre ce soutien financier et une intégration plus étroite. En réaction, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères a estimé qu’il « n’avait tout simplement pas compris la différence entre un district fédéral russe et un État indépendant ». Loukachenko lui-même aurait manifesté de l’irritation suite à ces rumeurs, et montre clairement qu’il n’a pas l’intention de céder à la pression.

Cependant, aucune décision n’aurait été encore été prise concernant cette potentielle fusion, qui risque de se heurter à une forte opposition, tant en Russie qu’en Biélorussie.

Le mandat de Poutine prend fin en 2024

Poutine, qui est âgé de 66 ans, est le dirigeant russe qui est resté le plus longtemps au pouvoir depuis Josef Staline. Il a déclaré à maintes reprises qu’il n’avait aucune intention d’amender la Constitution russe pour reporter la fin de son mandat actuel. Mais selon Bloomberg, ses assistants au Kremlin étudieraient des moyens pour le maintenir au pouvoir au delà de 2024.

Ils auraient invité le dirigeant du Kazakhstan, Nursultan Nazarbayev, à démissionner de son poste de président, sans renoncer au contrôle politique. Mais cette manoeuvre pourrait ne pas être acceptée en Russie.

Mais selon certains politologues, une fusion avec la Biélorussie serait une meilleure alternative. Le pays est très dépendant du pétrole et du gaz russes, et récemment, de nouvelles taxes lui ont été imposées.  Elles devraient aboutir à creuser un trou de 11 milliards de dollars dans les finances du pays sur les 5 prochaines années. « Je comprends ces allusions: voilà votre pétrole, mais vous devez détruire votre pays et rejoindre la Russie », a déclaré Loukachenko en décembre.

Un accord pour former un « Etat d’union » avec la Russie

En 1999, le président biélorusse avait signé un accord dans lequel il s’engageait à former un « Etat d’union » avec la Russie.  Mais depuis, il a refusé de créer une union monétaire commune, un système judiciaire et une politique étrangère et une politique de sécurité communes avec son grand voisin en échange des aides financières que celui lui accorde. Ces dernières, vitales pour la Biélorussie, ont été évaluées à 6 milliards de dollars par an par le Kremlin. « La Biélorussie rejette l’idée selon laquelle ce soutien équivaut à de la charité, le considérant comme le fruit de l’intégration économique entre les deux pays », écrit Bloomberg.

Loukachenko, parfois décrit comme « le dernier dictateur européen« , est au pouvoir dans son pays depuis 1994, et souhaite se représenter pour un nouveau mandat de 5 ans l’année prochaine. Même s’il proclame le lien fraternel que son pays entretient avec la Russie, il a toujours tenté de s’en garder à bonne distance, et cherché à se rapprocher de l’Union européenne, de la Chine et de l’Ukraine. La Biélorussie héberge des équipements militaires russes sur son sol, mais Loukachenko refuse l’ouverture de toute nouvelle base militaire russe.

Loukachenko résiste fermement

Dans un discours donné le 19 avril dernier, Loukachenko a promis de donner « une réponse particulièrement ferme » à toute tentative qui encouragerait la Biélorussie à renoncer à son indépendance. En mars, il a déclaré qu’en cas de éférendum, 98 % des Biélorusses se prononceraient contre une fusion avec la Russie. Néanmoins, il a également exclu la possibilité d’organiser un tel référendum.

« La probabilité d’un tel scénario – l’unification de la Biélorussie et de la Russie en un seul État sous la présidence de Poutine – est faible mais ne doit pas être écartée », affirme Andrei Yeliseyeu, directeur de recherche au Centre EAST, un groupe de réflexion basé à Varsovie.

Plus