Pendant près de 20 ans, le code de lancement des missiles nucléaires américains a été… 00000000

[PICTURE|sitecpic|lowres]

Steven M. Bellovin, professeur d’informatique à l’Université Columbia, a découvert un fait surprenant. De 1962 à 1977, en pleine guerre froide, le code de lancement pour tous les missiles américains à ogive nucléaire de type Minuteman a été le même : 00000000, écrit Today I Found Out. Bellovin a consulté un article de 2004, rédigé par Bruce G. Blair, un ancien officier de l’armée de l’air américaine, aujourd’hui président du Center for Defense Information, qui a travaillé dans le bunker des silos de lancement de Minuteman, contenant 50 missiles.

Dans cet article, Blair rapporte une conversation qu’il a eue avec Robert McNamara, secrétaire à la Défense américaine sous les présidences Kennedy et Johnson, de 1961 à 1968. Selon McNamara, les serrures de sécurité des silos de missiles nucléaires avaient été installées sur les Minuteman pour un contrôle plus strict et pour prévenir les lancements non autorisés. Les codes secrets de lancement de missiles nucléaires – connus sous le nom de Permissive Action Link (PAL) – étaient censés empêcher le lancement non autorisé ou la détonation de l’arme nucléaire, explique Mashable. Le président des Etats-Unis connaissait le « nuke code » qui donnait la possibilité d’utiliser de telles armes. En Juin 1962, John F. Kennedy avait signé le National Security Action Memorandum 160, une directive présidentielle ordonnant l’installation de PAL sur toutes les armes nucléaires américaines en Europe. Le dispositif de sécurité PAL avait été mis en place à la sortie de la crise de Chypre (1963-1964) durant laquelle Grèce et la Turquie avaient tenté de prendre le contrôle des missiles nucléaires prépositionnés de l’Otan.

Cette fonction de sécurité était en grande partie symbolique. Le code de huit zéros en lui-même n’était pas très secret et il n’a jamais été changé, explique Blair. Tout le personnel militaire le connaissait et le protocole avait été adapté de façon à ce qu’il n’y ait aucune modification.

« Notre manuel de contrôle de lancement nous donnait, à nous, l’équipe de tir, comme instruction de vérifier à deux reprises le panneau de verrouillage dans notre bunker souterrain afin de s’assurer qu’aucun autre chiffre que zéro n’avait été composé par inadvertance dans le panneau », affirme Blair.

McNamara avait expliqué également à Blair que le Strategic Air Command (SAC) avait décidé de simplifier les codes pour rendre plus facile le lancement d’armes nucléaires et s’assurer qu’il n’y avait pas besoin d’attendre une confirmation présidentielle qui leur aurait fait perdre un temps précieux en cas d’attaque russe. Par ailleurs, les centres de commande ou les lignes de communication pouvaient être anéantis et le risque de se retrouver avec un tas de missiles ne pouvant être lancés car personne ne possédait le code,  existait.  Blair, dans son papier, se dit choqué car le code secret 00000000 n’a jamais été modifié. Le président du Center for Defense Information a également souligné « l’important décalage entre les dirigeants élus et les militaires lorsqu’il s’agissait d’armes nucléaires pendant la guerre froide ».

Bruce Blair avait co-signé, en 1977, un article intitulé « The Terrorist Threat to World Nuclear Programs », dans lequel les auteurs plaidaient pour une approche sérieuse de l’activation de serrures de sécurité des silos de missiles nucléaires. Mais le système vanté par McNamara était déjà activé et le lancement de missiles pouvait être réalisé par une personne sans l’autorisation présidentielle. Toutefois, les codes ont été changés, par hasard, la même année de publication de l’article.

Plus