Pas de ras-de-marée populiste en République tchèque, mais le retour des communistes

En République tchèque, le parti communiste de Bohême et de Moravie (KSCM), héritier du régime qui présidait à la destinée du pays durant l’ère du bloc soviétique, effectue un retour remarqué.

Le 12 juillet dernier, il a soutenu Andrej Babis, un milliardaire populiste, dont le parti centriste Ano avait remporté les élections législatives en octobre 2017, et lui a permis de remporter un vote de confiance au Parlement, lui permettant enfin de gouverner le pays, après 9 mois d’impasse politique.

Un soutien nécessaire à Babis pour former le gouvernement

Babis avait dans un premier temps échoué à former un gouvernement viable, notamment en raison de ses démêlés avec la justice. Il est au centre d’une enquête judiciaire, pour des soupçons de fraude aux subventions européennes.

Il s’était allié avec les sociaux-démocrates avec lesquels il avait formé un gouvernement de coalition minoritaire. Il leur aura fallu le soutien du Parti communiste, échangé contre des postes importants dans les administrations et les entreprises d’État, et l’adoption de certaines des mesures de leur programme politique pour parvenir effectivement à se voir confier les rênes du pays.

Une première depuis 1989

Depuis la chute du mur de Berlin, le parti communiste tchèque, qui demeure le seul parti communiste d’Europe directement issu de l’ère soviétique, avait réussi à se maintenir à plus de 10 % des intentions de vote, atteignant même 18,5 % en 2002.

Mais ses scores se sont peu à peu érodés, tombant à 7,8 % l’année dernière, le pire résultat de son histoire. Ouvertement pro-russe et anti-OTAN, il occupe 15 sièges au Parlement.

Même s’il ne s’est pas vu confier de portefeuille ministériel, ce soutien l’a fait sortir de l’ombre pour la première fois depuis la chute du communisme en 1989.

Une occasion à ne pas manquer

Vojtech Filip, le président du KSCM, compte bien profiter de cette aubaine. Il a repris à son actif l’augmentation des revenus des retraités tchèques et affirmé que son parti travaillait à l’obtention d’une augmentation des salaires des fonctionnaires et du salaire minimum.

“Le modèle néolibéral est en crise”, a-t-il récemment déclaré dans une interview donnée à Bloomberg. “L’aspect le plus séduisant de notre programme est la justice sociale, qui n’existe pas ici. Il y a eu un élargissement significatif du fossé entre les plus riches et les masses”. Il affirme que son parti ne soutiendra le budget 2019 au parlement que si le cabinet respecte leur accord et qu’il n’hésiterait pas à rejeter les propositions budgétaires qu’il ne “trouverait pas appropriées”.

Une pomme empoisonnée pour Babis

Pour Babis, qui aurait sans doute préféré s’allier avec la droite, c’est une pomme empoisonnée. Non seulement, cette présence pourrait être source de chantage, mais de plus, l’opinion est divisée au sujet de ce retour, et on lui reproche d’avoir fait appel au KSCM.

L’hostilité de ce dernier à l’égard de l’OTAN – il a réclamé par le passé la dénonciation du pacte – risque de poser des difficultés pour le Premier tchèque. Filip a déjà indiqué qu’il s’opposerait à l’envoi de militaires tchèques à l’étranger pour participer à des missions. “Nous ne voulons pas que les décisions de l’OTAN nous entraînent dans des problèmes que nous n’avons pas causés et dans lesquels nous ne voulons pas être impliqués”, dit-il.

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