Napa Valley : Le goût du vin affecté par la fumée ?

La prestigieuse région viticole de Napa Valley, située en Californie, a été en proie à de gigantesques  incendies au cours de ces deux dernières années. Les producteurs redoutent maintenant que leur millésime 2018 ne soit affecté par le “smoke taint”, le goût de fumée qui avait souvent caractérisé la cuvée 2017.

Les vignerons expliquent que les vignes épargnées par l’incendie ne sont pas toujours à l’abri des vents violents qui charrient des panaches de fumée. Cette fumée se dépose sur les raisins, conférant un goût de cendre désagréable au vin, qui peut éventuellement devenir imbuvable, et doit être revendu à des grossistes en vrac. Selon les experts, entre 10 et 20 % des exploitations de la région ont dû vendre une partie ou la totalité de leur production à perte pour cette raison.

Or, même si cette année, la région a été relativement épargnée par les violents incendies qui ont frappé la Californie en 2017 et cette année, dont le plus grand de l’histoire de l’Etat américain, ce problème demeure.

Le Guaiacol

En effet, ce goût désagréable provient d’une substance chimique volatile, le guaiacol, issue de la combustion de la fibre du bois, la lignine, lors des incendies. Ce composant est transporté par les vents, et peut se déposer sur les raisins mûrs. Il se combine alors chimiquement aux sucres présents sur la peau des grains pour se transformer en glycosides indétectables. Le vigneron peut penser que ses grappes ont été épargnées, malheureusement, ces glycosides sont susceptibles de se libérer à n’importe quel stade de la fabrication du vin. Ils peuvent donc gâcher ses arômes en cours de maturation. Un vin qui semblait exempt de cette pollution au moment de sa mise en bouteille peut dégager par la suite ce goût de fumée, lors de sa conservation en cave, par exemple.

Néanmoins, 3 il existe 3 conditions pour que la récolte soit menacée : d’abord, les vignes doivent avoir été exposées à la fumée pendant au moins 3 jours. Ensuite, certains cépages, comme le syrah ou le merlot, sont plus vulnérables à ce phénomène que le cabernet sauvignon, par exemple. Enfin, des raisins mûrs, plus gorgés de sucres, sont également plus exposés.

De même, les vignerons peuvent se consoler avec l’idée que la pollution n’est pas durable, et qu’elle ne menace aucunement leurs récoltes à venir, et que leur vin, même s’il a perdu ses qualités exceptionnelles, n’est pas impropre à la consommation. Ils pourront donc le vendre sous une autre forme. Certaines techniques pour éliminer le goût de cendre, comme la filtration ou l’osmose inversée, apportent peu de résultat.

Un fond pour financer les recherches

Mais les vignerons engagent de 4000 à 12 000 dollars de dépenses pour chaque tonne de raisin récoltée, et la réputation de leur domaine est cruciale pour leur exploitation, de même que la réputation de la Napa Valley toute entière.

Pour échapper à cette incertitude, ils se voient donc contraints de faire effectuer des tests en laboratoire pour dépister l’éventuelle présence de ces composés. Ces mêmes laboratoires tentent également de trouver un moyen de supprimer ce goût désagréable. Compte tenu du réchauffement climatique, il faut s’attendre à ce que la sécheresse du climat s’intensifie, et à la multiplication des incendies à l’avenir dans cette région. Les vignerons californiens l’ont bien compris, qui ont mis en place un fond de plusieurs dizaines de millions de dollars pour financer ces recherches.

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