Les frites sont-elles belges ou françaises?

Cette semaine, à l’occasion de la Journée internationale de la frite belge, Pierre Leclercq, historien de la gastronomie de son État (et Belge) a répondu à une question éminemment politique dans le journal français Le Figaro : les frites sont-elles une création des Belges ou des Français ?

La frite – un bâtonnet de pomme de terre cuit dans de la graisse – est une invention parisienne et les Américains sont donc tout à fait fondés à parler de “french fries”, répond Leclercq.

La frite est révolutionnaire

Notre mets préféré aurait probablement été créé à la fin du XVIIIe, au coeur de la Révolution française. Des vendeuses de friture proposaient les irrésistibles bâtonnets dans les rues de Paris, et plus particulièrement aux abords des nombreux théâtres de la capitale française. La recette de la frite apparaît dans les livres de cuisine dès l’année 1855, et à partir des années 1860, on commence à lire le terme de “frite”, plutôt que “pomme de terre frite” dans les articles des journaux.

Les frites ont été associées dès le départ aux milieux populaires, dont elles sont vite devenues un élément identitaire dans les nombreux vaudevilles ou chansons qui y étaient consacrés.

Monsieur Fritz

Leur recette est arrivée à Lille, puis en Belgique en 1844, grâce à Frédéric Krieger. Ce musicien et forain bavarois devenu cuisinier avait travaillé comme apprenti chez un rôtisseur parisien, où il avait appris la règle des deux bains de friture qui préside à leur élaboration.

Peu après son retour en Belgique, il avait fondé Fritz, la première société à installer des baraques à frites en toile sur les foires pour vendre “la pomme de terre frite à l’instar de Paris”.

L’appropriation de la frite par les Belges serait un phénomène relativement récent, puisqu’elle aurait été déclenchée par un article de presse en 1985, affirmant que la frite avait été inventée en Wallonie à la fin du XVIIe, comme l’attestait un manuscrit de Joseph Gérard, datant de 1781, dont est tiré cet extrait : “Les habitants de Namur, Andenne et Dinant ont l’usage de pêcher dans la Meuse du menu fretin et de le frire pour en améliorer leur ordinaire, surtout chez les pauvres gens. Mais lorsque le gel saisit les cours d’eau et que la pêche y devient hasardeuse, les habitants découpent des pommes de terre en forme de petits poissons et les passent à la friture comme ceux-ci. Il me revient que cette pratique remonte déjà à plus de cent années”.

Mais il y a une incohérence : la pomme de terre n’a été introduite dans le Namurois qu’au XVIIIe, vers 1735. Elle ne pouvait donc pas être consommée à Namur, Andenne ou Dinant depuis une centaine d’années en 1781.

Néanmoins, nous pouvons nous consoler à l’idée que le fritkot, que le monde entier nous envie, est bien belge quant à lui.

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