Le paradoxe de l’immigration : plus ils sont nombreux à venir, plus ils sont nombreux à rester dans leur pays

L’année dernière, les migrants du monde entier ont transféré 466 milliards de dollars (soit environ 381 milliards d’euros) dans leur pays d’origine, rapporte la Banque Mondiale. C’est 8,5 % de plus qu’en 2016. Cette forte hausse des transferts d’argent est principalement liée à la bonne santé économique du monde.

Les transferts d’argent ont fortement augmenté en Europe et en Asie centrale (plus 21 %), ainsi qu’en Afrique subsaharienne (11,4 %). L’Inde est le pays qui a le plus profité de ces arrivées de capitaux, avec un total de 56 milliards d’euros). Elle est suivie de la Chine (52 milliards d’euros), des Philippines (27 milliards d’euros), du Mexique (25 milliards d’euros), du Nigéria (18 milliards d’euros) et de l’Égypte (16 milliards d’euros).

Et ce n’est pas fini, puisque la Banque Mondiale prévoit que ces transferts d’argent devraient encore augmenter cette année de 4,1 % pour atteindre 397 milliards d’euros.

Les envois d’argent cruciaux en Afrique

Un autre rapport, élaboré par l’African Institute for Remittances (AIR) avait quant à lui évalué que le montant des transferts de capitaux effectués en 2017 par les migrants africains vers leur pays d’origine à 65 milliards de dollars (environ 53 milliards d’euros). C’est plus du double des 29 milliards de dollars (environ 24 milliards d’euros) d’aide publique qui ont été adressés au continent africain cette même année. Le rapport de l’ère indique également que ces transferts de fonds ont été adressés par 30 millions d’immigrés africains, et qu’ils profitent à 120 millions de leurs compatriotes.

Par ailleurs, l’organisme estime que ces données sont probablement largement sous-estimées, en raison de l’existence de canaux de transferts informels, et de la capacité limitée des autorités de certains pays d’Afrique à recueillir des données exhaustives.

Globalement, les transferts d’argent représentent le triple de l’aide au développement

De son côté, l’OCDE a calculé que l’aide publique au développement international avait atteint 146,6 milliards de dollars (environ 120 milliards d’euros) en 2017. Autrement dit, les transferts d’argent des migrants représentent le triple du montant global de l’aide au développement. Les transferts d’argent des migrants peuvent même représenter jusqu’à 90 % de l’intégralité des revenus de certains villages maliens ou sénégalais, souligne l’anthropologue Michel Agier, qui est aussi directeur d’études à l’Ehess et chercheur à l’Institut de recherche pour le développement (IRD).

Cet argent contribue à améliorer l’ordinaire des familles sur place, mais il leur permet aussi d’investir pour améliorer la productivité et les moyens de subsistance, en particulier dans l’agriculture.

Le paradoxe de l’immigration

L’argent que les migrants envoient à leurs familles augmente les chances de ces dernières de se bâtir un avenir dans leur pays. Or, d’ici le milieu de ce siècle, la population mondiale devrait augmenter de 31 % pour atteindre 9,8 milliards d’habitants, selon les chiffres du Population Reference Bureau (PRB). La population africaine, qui atteindra alors 2,6 milliards d’habitants, devrait plus que doubler, absorbant 57 % de la croissance démographique mondiale. Des millions d’Africains viendront tenter leur chance en Europe.

En tenant compte du fait que ce sont surtout les immigrants qui assurent le développement des des populations locales dans leur pays d’origine, on aboutit à un paradoxe :

Plus il y aura d’immigrants dans les pays développés, et plus leurs compatriotes seront incités à demeurer dans leur pays.

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