Le Japon veut renoncer au paiement des heures supplémentaires pour les salariés les mieux payés

Au Japon, le gouvernement conservateur de Shinzo Abe veut supprimer le paiement des heures supplémentaires au-delà de 40 heures de travail pour les employés les mieux payés du pays, rapporte La Tribune. Le but de cette réforme serait d’améliorer la productivité du pays, l’une des plus faibles des pays développés. Les salariés qui gagnent plus de 10,75 millions de yens (80.000 euros) ne seront donc plus payés que sur leurs résultats, et les plus talentueux d’entre eux ne seront plus tenus de rester tard le soir à leur travail s’ils parviennent à boucler plus rapidement les tâches qu’ils ont à faire. 

Mais cette réforme suscite l’inquiétude dans un pays confronté à de nombreux cas de burn out.  Chaque année, en effet, près de 10.000 travailleurs japonais meurent d’accidents vasculaires cérébraux, de crises cardiaques ou de suicides causés en réalité par leur surmenage au travail, un phénomène appelé « karoshi », et considéré comme une maladie professionnelle. En 2013, 196 décès liés à un excès de travail ont été enregistrés, et d’après Shigeru Waki, enseignant à l’université Ryukoku, ce chiffre est largement sous-estimé, compte tenu qu’il est difficile de prouver qu’une personne est décédée en raison de son surmenage. Il critique la proposition de loi, estimant qu’elle rendra encore plus difficile la quantification de ce problème.

D’après l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), 22,3% des employés japonais effectuent au moins 50 heures de travail hebdomadaires, alors que cette proportion n’est que de 12,7% au Royaume Uni, de 11,3% aux Etats-Unis ou de 8,2% en France.

En moyenne, les travailleurs japonais ne prennent que 9 jours de vacances par an, seulement la moitié des congés auxquels ils ont droit. Pire, 16% des salariés à plein temps n’ont pris aucune vacance en 2013. Une étude du gouvernent a montré que cette abstinence était imputable à un sentiment de culpabilité.

La mesure ne concernerait que 4% des travailleurs du secteur privé du pays, soit 1,85 millions d’actifs. Le gouvernement assure qu’ils auront la possibilité d’opter pour l’ancien système du paiement des heures supplémentaires. Mais les critiques observent qu’ils se sentiront probablement contraints d’accepter le nouveau système, de peur d’essuyer les remontrances de leur employeur, et qu’ils continueront donc de se démener au travail, mais désormais, sans recevoir de rémunération correspondante.

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