“Le Brexit sera un succès pour le Royaume-Uni, en raison de ses atouts uniques”

“Pour quelle raison possible un ressortissant belge, qui a grandi en même temps que les institutions européennes, souhaite-t-il devenir citoyen britannique? Et pourquoi voudrait-il faire cela alors que son nouveau pays s’emploie à se séparer de l’Union européenne? La réponse est simple et étonnamment impopulaire: je suis convaincu que le Brexit sera un succès”, écrit le journaliste Marc Roche.

M. Roche a été correspondant à Londres pour le journal français Le Monde, et a récemment publié l’ouvrage “Le Brexit va réussir” (Albin Michel). Il explique qu’initialement, il ne soutenait guère ce divorce, et qu’il était convaincu que le camp du “Remain” l’emporterait. Mais il a changé d’avis, et désormais, il pense que le point de vue des Européens selon lequel la Grande-Bretagne est vouée à devenir “l’homme malade de l’Europe”, est erroné. Le Royaume-Uni “gagnera la bataille du Brexit à long terme”, en raison de ses atouts uniques, écrit-il. Sa conviction est si forte qu’il a sollicité la nationalité britannique.

Les atouts uniques du Royaume-Uni sont un anathème pour les autres Européens

“L’acceptation par le pays des inégalités sociales et de classe, la déréglementation totale du marché du travail, son réservoir de main-d’œuvre bon marché, l’affaiblissement des syndicats et l’ampleur réduite de son État-providence peuvent être un anathème pour la plupart des Européens. Mais combinés, ils conféreront un avantage à une nation qui a toujours été darwinienne et qui croit que seul le plus fort peut survivre.

Les collègues britanniques européens ont sous-estimé l’attractivité d’un Royaume-Uni hors de l’UE aux yeux des investisseurs étrangers, notamment des pays émergents.

Le Royaume-Uni, libéré du nationalisme économique, n’a pas hésité à vendre les plus beaux bijoux de sa couronne industrielle au plus offrant. Quel autre pays aurait ainsi cédé des pans entiers de son industrie nucléaire aux Chinois ?

Les banques étrangères resteront également dans la ville de Londres, centre financier international dominant, avec ses effectifs cruciaux de professionnels anglophones bien établis venus du monde entier qui utilisent la flexibilité de la “common law”. Francfort, Paris ou Dublin ne font pas le poids face à Londres et ne pourront pas la détrôner.

Libérée des contraintes réglementaires de l’UE, la City pourrait devenir une plate-forme «offshore» aux portes de l’UE, attirant des fonds du monde entier, en particulier de pays comme la Chine.

Les « Remainers » sont ceux qui tireront le mieux parti du Brexit

Le paradoxe du Brexit est que ce sont les vaincus – les Remainers – qui risquent en fin de compte d’y gagner le plus.

Les classes professionnelles éduquées et cosmopolites de Londres et du sud-est de l’Angleterre – qui ont pour la plupart voté pour rester au sein de l’UE – seront à l’avant-garde de l’économie de demain, qui sera essentiellement une économie de la connaissance basée sur les universités du pays, les prouesses des médias, le pouvoir d’influence et la culture.

Les classes ouvrières qui ont voté pour quitter l’UE, par contraste, risquent de devenir les plus grandes perdantes du Brexit. Mais le choc sera atténué par la hausse des investissements industriels étrangers dans le nord, les Midlands ou le pays de Galles. Hors de l’UE, le Royaume-Uni sera toujours intéressant du point de vue économique.

Le Royaume-Uni, contrairement à la France et l’Irlande, respecte la voix populaire

L’un des grands mérites du Royaume-Uni, c’est que, contrairement à l’Irlande et à la France, où les électeurs ont été ignorés lorsqu’ils ont opté pour un vote eurosceptique et qu’ont les a forcés de recommencer, l’establishment politique britannique a choisi de respecter la voix du peuple. (…)

J’ai gardé mon passeport belge pour des raisons sentimentales. Mais maintenant, je peux participer pleinement à la vie politique d’une nation en train de se réinventer.

Hors du bloc, le Royaume-Uni ne sera pas un meilleur pays. Mais ce sera un pays différent, et ce sera un véritable coup de semonce pour une Union européenne au bord de l’implosion”.

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