La Grèce laisse tomber le populisme et opte de nouveau pour l’establishment

Près de 10 ans après le début de la crise qui a conduit la Grèce au bord de l’effondrement, les Grecs choisiront un Premier ministre de centre droit le 7 juillet. Cela fait de la Grèce le premier pays de l’UE à se détourner du populisme et à opter de nouveau pour l’establishment.

Le 7 juillet, les Grecs éliront Kyriakos Mitsotakis, 51 ans, chef du parti de centre-droit Nea Dimokratia (ND), comme Premier ministre. Même dans les sondages les moins favorables à la ND, elle a toujours un avantage de 8% sur le mouvement de gauche Syriza, qui est au pouvoir depuis 2015. Lors des élections européennes du mois dernier, le parti du Premier ministre Tsipras s’est retrouvé à plus de 10 points de pourcentage derrière Nea Dimokratia. Le mandat de Tsipras se prolongeait normalement jusqu’en octobre, mais sous la pression des mauvais résultats de la fin mai, il a décidé de convoquer de nouvelles élections pour le 7 juillet.

Même si Nea Dimokratia n’obtient pas la majorité absolue, il est probable que Mitsotakis succédera à Alexis Tsipras en tant que Premier ministre. Ce dernier est maintenant sanctionné pour la politique de rigueur qu’il a imposée sur les conseils de l’UE et du FMI.

3 dynasties grecques: Karamanlis, Papandreou et Mitsotakis

Tout comme Karamanlis et Papandreou, Mitsotakis est également un nom bien établi dans la politique grecque. Depuis que la Grèce a remplacé le régime militaire par une démocratie en 1974, ces trois familles ont fourni le Premier ministre pendant sur 27 des 45 dernières années. Remettre l’establishment en cause n’est pas une option pour Mistotakis. Son père Konstantinos était Premier ministre de 1990 à 1993. Son cousin Kostas Bakoyannis est récemment devenu maire d’Athènes.

Kyriakos Mitsotakis lui-même a été ministre de la Réforme administrative entre 2012 et 2015 et a ce titre, il est l’auteur de la réduction des effectifs de l’administration publique grecque imposée par l’UE.

Grèce : de l’oxygène pour une économie en ruine

Après des années de politique de rigueur, Mitsotakis veut redonner un nouveau souffle à l’économie grecque en supprimant toutes sortes de règles et de taxes qui ont un impact négatif sur les entreprises. Cela devrait également donner un nouvel élan à un projet d’un milliard de dollars sur le site de l’ancien aéroport d’Athènes. Il espère y relancer la construction d’un centre d’affaires et d’un complexe de vacances de luxe. Ce projet est au point mort depuis des années en raison d’une série de problèmes bureaucratiques. Mistostakis veut aussi sabrer davantage dans la fonction publique.

Malgré son passé, Mitsotakis souhaite mettre fin au népotisme et au clientélisme grecs. La relation avec la vieille garde au sein de son propre parti est tourmentée, pour le moins que l’on puisse dire.

Les investisseurs nationaux et étrangers voient d’un bon œil l’arrivée de Mitsotakis, mais restent sur leurs gardes concernant Alexis Tsipras, dont le rôle de chef de l’opposition ne serait pas terminé de sitôt. Les réformes prévues par Mistotakis menacent de redynamiser les troubles sociaux dans le pays, que Tsipras a réussi à bien maîtriser.

Mitsotakis est moins préoccupé par l’UE

Pour réduire leur énorme dette, les Grecs ont promis à l’UE de dégager un excédent budgétaire de 3,5 % chaque année. Ce ne sera pas une tâche facile pour un candidat au poste de Premier ministre qui veut mettre en œuvre des réductions d’impôts d’ici le 1er janvier 2020. De cette façon, il veut stimuler la croissance économique, en suivant le modèle américain.

Mitsotakis est moins préoccupé par l’UE. Le rôle que joue l’Union dans les affaires intérieures semble être de plus en plus dilué. Il devient de plus en plus difficile de faire respecter les restrictions budgétaires imposées, comme cela a été démontré récemment en Italie et en France. Le départ imminent de la chancelière allemande Merkel menace également de renforcer cette tendance. Selon Mitsotakis, les partenaires de l’UE fermeront les yeux lorsque les excédents budgétaires seront légèrement inférieurs à ceux convenus. De cette manière, l’Europe devrait donner un peu d’oxygène économique à son « gouvernement fortement réformateur ».

Désormais, l’économie grecque se porte de nouveau mieux et le pays est également en mesure d’emprunter de l’argent sur les marchés financiers. Une récente émission obligataire d’une durée de 10 ans et d’un taux d’intérêt d’à peine 2,5 % a été un succès. La bourse grecque ASE est également l’une des plus performantes au monde avec une hausse de 35% cette année.

Tsipras en chef de l’opposition

Pour le moment, les investisseurs ne veulent pas s’inquiéter. Les gouvernements de gauche ont toujours trouvé plus facile de mettre en œuvre des réformes en profondeur. Gerhard Schröder en Allemagne et Tony Blair au Royaume-Uni l’ont fait avec succès. Les mesures mises en œuvre par Tsipras ces dernières années ont également été pratiquement impossibles sous un gouvernement de centre droit. À l’avenir, lorsque Mitsotakis prendra des mesures similaires, Syriza et les syndicats seront moins indulgents. Tsipras en profitera sans doute pour jouer le rôle qui lui convient: celui de chef de l’opposition.

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