La BCE veut un euro plus important et plus global

La Banque centrale européenne et la Commission européenne plaident pour un rôle plus important et plus global de l’euro. La monnaie unique est la deuxième monnaie la plus échangée au monde après le dollar américain. Cependant, son impact reste limité, précisément en raison de la domination apparemment inattaquable du «billet vert».

La Commission européenne a déjà déclaré que la stratégie ‘America First’ de Trump et les sanctions économiques prises contre l’Iran justifiaient la nécessité d’un rôle plus global de l’euro. Mais concrétiser une telle chose n’est pas la même chose que le dire. Auparavant cette semaine, le journaliste britannique Gideon Rachman (Financial Times) a une nouvelle fois expliqué que l’arme la plus puissante de l’arsenal économique américain n’était pas ses sanctions économiques, mais le fait que le dollar était la monnaie de réserve du monde. Ce n’est pas pour rien que Rachman est considéré comme l’un des commentateurs étrangers les plus influents au monde.

Rachman : « Si vous effectuez une transaction importante en dollars, même à l’extérieur du pays, vous aurez presque certainement affaire au système financier américain. Et cela vous rend vulnérable au bras long de la loi américaine. D’autres pays s’interrogent sur la manière de remédier à cette vulnérabilité. Remplacer le dollar en tant que devise favorite du monde est une entreprise longue et ardue.

Toutes les alternatives au dollar sont insuffisantes

Toutes les alternatives existantes ont leurs défauts :

  • La Russie n’est pas une économie assez grande pour soutenir une monnaie mondiale et faire des affaires en Russie est dangereux.
  • Le renminbi chinois n’est pas entièrement convertible et ne peut donc pas être transféré de manière transparente dans le monde entier. Les autorités chinoises craignent que le passage à une monnaie entièrement convertible n’entraîne une fuite massive des capitaux de Chine, ce qui en dit long sur le côté effrayant de leur propre système.
  • Enfin, l’UE offre l’état de droit, un grand marché et une monnaie entièrement convertible.Mais l’euro est encore loin de rivaliser avec le dollar, peut-être parce que les institutions qui soutiennent la monnaie européenne sont toujours en construction et que le souvenir de la crise de la zone euro sont encore frais dans les mémoires. »
Onur Coban/Anadolu Agency/Getty Images

L’euro reste pour le moment la deuxième monnaie la plus importante du monde. Mais l’écart avec le dollar américain est important, précisément parce que ce dernier est la norme pour presque toutes les transactions internationales. Cette domination est visible, par exemple, dans le secteur pétrolier, où 85 % des transactions intra-UE sont effectuées en dollars américains. La liquidité et la taille des marchés obligataires américains sont également beaucoup plus importantes que celles des zones monétaires concurrentes.

La monnaie de réserve du monde … un privilège exorbitant

Le fait que le dollar américain soit la monnaie de réserve mondiale n’a que des avantages. C’est un phénomène que l’ancien président français Valery Giscard d’Estaing a décrit un jour comme un « privilège exorbitant ». Le Français tentait d’expliquer pourquoi les États-Unis peuvent emprunter à moindre coût et que le dollar est moins soumis aux fluctuations sur les marchés des changes.

La fragmentation du système commercial mondial menace…

Cependant, la popularité du dollar a été frappée depuis la crise financière mondiale de 2008. En particulier, les banques centrales des économies émergentes échangent de plus en plus leurs dollars contre d’autres devises, dont l’euro. Depuis 2017, les réserves libellées en euros détenues en dehors de la zone euro ont augmenté de 1,2 %. En revanche, les réserves en dollars internationaux ont diminué de 7 %.

Dans un discours prononcé à l’occasion de la présentation du rapport annuel de la BCE, Benoît Cœuré, membre du Conseil des gouverneurs, a déclaré qu’il existait effectivement un risque de fragmentation du système commercial mondial. Un euro plus influent pourrait en bénéficier. De cette manière, l’UE pourrait user de plus d’influence politique. Il serait également possible d’introduire ses propres sanctions, un privilège dont seul Washington jouit pour l’instant.

Enfin, Coeuré estime qu’un rôle plus important de l’euro serait bénéfique pour l’économie européenne. Parce qu’elle deviendrait alors moins dépendante des décisions prises par la Réserve fédérale américaine.

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