Enfin ! Après 8 ans de purgatoire, la Grèce retourne sur les marchés financiers

Le 20 août prochain, la Grèce sera le dernier Etat membre de l’Union européenne à sortir de son plan de sauvetage. Beaucoup se félicitent des progrès accomplis par le pays au cours des dernières années, mais le Fonds Monétaire International (FMI) a émis un rapport cette semaine qui devrait refroidir leurs ardeurs.

En 2009, le Premier ministre grec avait admis que les chiffres du déficit grec avaient été minimisés pendant des années, et que le déficit réel représentait probablement le double. Les agences de cotation avaient immédiatement dégradé la cote de crédit du pays, les taux d’intérêt avaient grimpé, et en 2010, le gouvernement grec avait dû solliciter une première aide d’urgence.

En échange des prêts qui se sont finalement cumulés à 320 milliards d’euros sur les 3 plans de sauvetage dont elle a bénéficié, la Grèce a dû consentir à engager des réformes structurelles douloureuses.

Un fond de caisse de 24 milliards d’euros

Les créanciers du pays, comme le gouvernement, pensent maintenant que le pays est prêt pour retourner sur les marchés financiers. Au mois de juin, Athènes a reçu une dernière tranche de prêt de 15 milliards d’euros, et bénéficié de concessions pour faciliter ce retour. Grâce à ce versement, la Grèce disposera d’un matelas de 24 milliards d’euros, qui devrait lui permettre de couvrir ses dépenses pendant 22 mois, et qui devrait rassurer les investisseurs L’échéance de remboursement de certains emprunts a été reportée, tandis que le taux d’intérêt de certains autres a été réduit.

Le gouvernement grec s’est engagé à maintenir un excédent primaire (c’est-à-dire hors charges d’intérêt) de 3,5 % du PIB jusqu’en 2020. Un objectif aussi ambitieux n’a guère été réalisé que par un tout petit nombre de pays non producteurs de pétrole au cours des 30 dernières années. Les mêmes clauses prévoient qu’après 2020, l’excédent budgétaire devra encore représenter 2,2 % du PIB jusqu’en 2060. Pendant les premières années, la troïka, composée du FMI, de la banque centrale européenne et de l’Union européenne, contrôlera chaque trimestre que ces normes sont respectées. Le ministre des finances grec, Euclide Tsakalotos, est persuadé que la Grèce fera encore mieux.

La crise a révélé les faiblesses du modèle économique grec, qui reposait sur des taux d’intérêt faibles, favorisant le creusement des déficits et de l’endettement public, comme privé. D’un autre côté, l’accent n’était pas assez mis sur les exportations. Les salaires étaient déconnectés de la productivité, ce qui faisait du pays l’un des moins compétitifs dans la zone euro. Enfin, la bureaucratie étouffait les administrations et la justice.

Peu de raisons de se réjouir, selon le FMI

Mais le pays n’est pas pour autant sorti de ses difficultés, et vit toujours à l’heure de l’austérité la plus drastique, rappelle le FMI dans son rapport. Il reste affligé d’une dette qui représente 180 % de son PIB, ce qui fait d’elle le pays le plus endetté de la zone euro. Cela signifie également qu’elle suscitera toujours une certaine méfiance sur les marchés financiers, et qu’au moindre doute, les taux d’intérêt de sa dette souveraine repartiront à la hausse.

La Grèce a renoué avec la croissance, après des années de récession et de marasme. L’économie a crû de 1,4 % en 2017, et ce rythme devrait passer à 2 % cette année. S’il veut améliorer ce rythme, le pays devra travailler pour améliorer l’environnement qu’il offre aux entreprises, car il est bien plus difficile de faire des affaires en Grèce que dans les autres pays européens. 

Le système bancaire grec est encore fragile, et les bilans des banques sont grevés par des créances douteuses qui représentent près de la moitié des emprunts qu’elles ont consentis.

Les citoyens grecs ont payé le prix fort

En outre, 20 % des actifs grecs sont encore au chômage, et cette proportion grimpe même à 40 % pour les jeunes. Des centaines de milliers de jeunes qualifiés ont quitté le pays à la recherche d’un avenir meilleur. Une grande partie de la population a été catapultée dans la pauvreté, ou risque fortement d’y sombrer, ce qui qui pourrait compromettre les chances d’une reprise durable. Le vieillissement rapide de la population est une autre source d’inquiétude.

La situation s’améliore graduellement, pour partie grâce au retour des touristes, dont le nombre a récemment doublé. La chute des salaires a permis d’améliorer la compétitivité, au travers du processus que l’on nomme dévaluation interne : puisque la Grèce ne peut dévaluer sa monnaie, l’euro, ce sont les prix et les salaires qui ont été dévalués. Au terme des 6 années de récession qu’ont connu les Grecs après la crise financière, leur revenu disponible avait chuté de plus de 30%.

D’un autre côté, les Grecs les plus aisés ont été largement mis à contribution. Suite à la politique d’austérité menée pour redresser l’économie, le taux d’imposition grec est maintenant plus élevé que la plupart de ceux des autres pays de l’Union européenne, et atteint 70 % pour les Grecs qui gagnent au moins 40 000 € bruts. Néanmoins, le seuil d’imposition dépasse le revenu médian du secteur public du pays, ce qui signifie qu’un grand nombre de Grecs en sont exonérés, et que les recettes correspondantes ne reposent que sur un groupe de contribuables restreint. Et le pays n’a pas mené certaines réformes importantes dans le domaine de la fiscalité et des marchés…

Plus