Algérie : le président Bouteflika “Weekend at Bernie’s” renonce

Lundi, après deux semaines de protestations persistantes, le président algérien Abdelaziz Bouteflika a annoncé qu’il ne se présenterait pas aux élections prévues pour le mois prochain. 

Dans le même temps, il est annoncé que les élections seront reportées à une date ultérieure. Il y aura également un remaniement des portefeuilles ministériels.

Bouteflika n’avait plus le choix. Un millier de juges avaient indiqué qu’ils ne superviseraient pas les élections présidentielles si Bouteflika restait candidat. Une grève nationale annoncée dans le secteur crucial du pétrole et du gaz menaçait de paralyser le pays. L’entourage du président gravement malade a alors décidé d’intervenir. L’armée a également envoyé un signal clair. Le commandement de l’armée a annoncé qu’une grande partie de l’appareil militaire soutenait les manifestations. Lorsque l’appareil militaire ne soutient plus le pouvoir, la fin est généralement proche.

Bouteflika est un héros de la guerre d’indépendance algérienne contre la France au début des années soixante du siècle dernier. Depuis son arrivée au pouvoir en 1999, il a dirigé d’une main de fer son pays riche en pétrole et en gaz naturel. Bouteflika a ensuite remporté l’élection présidentielle de manière convaincante. Elles ont mis fin à une guerre civile destructrice entre les islamistes et le gouvernement, qui a coûté la vie à plus de 200 000 personnes.

L’Algérie est devenue ce qu’elle est après avoir été un Etat islamique

En 1992, l’armée est intervenue après que le Front islamique eut remporté le premier tour des élections législatives. Ce mouvement s’efforçait d’établir un État islamique. L’armée a ensuite pris le pouvoir. Entre 1994 et 1999, le pays était alors dirigé par Liamine Zeroual, un soldat.

Bouteflika et son entourage de parents et de généraux ont mis en place une « démocratie contrôlée » (lire : un Etat policier) après leur victoire en 1999, mais ont aussi mis fin aux conflits sanglants du passé.

Bouteflika est une photo sur un chevalet

Il a été victime d’un grave accident vasculaire cérébral en 2013. Lorsqu’il est censé assister à des réunions ou à des cérémonies, on place une photo de lui sur un chevalet. Le fait qu’il soit toujours à la tête du pays est dû à l’incapacité des élites algériennes divisées de nommer quelqu’un d’autre qui «peut maintenir l’équilibre du pouvoir».

« Remplacer une marionnette par une autre »

L’annonce de lundi calme temporairement les esprits, mais de nombreuses questions restent sans réponse. Bouteflika ne démissionne pas et son entourage conserve le pouvoir sur le pays. La question est de savoir si le remaniement annoncé de l’appareil du pouvoir affectera le sommet algérien lui-même. Les dindes ne votent généralement pas pour Noël. On craint un scénario égyptien, selon lequel l’armée utiliserait la révolte pour étendre son pouvoir sur le pays. Une vidéo diffusée sur Twitter montre un jeune algérien qui dit que le régime a remplacé « une marionnette » par une autre.

Mais les centaines de milliers de jeunes Algériens âgés de moins de 30 ans qui constituent 70 % de la population n’ont pas connu la guerre civile. Ils en ont assez du système opaque et sclérosé que Bouteflika et ses partisans défendent. 29 % des Algériens de la tranche d’âge 16-24 ans sont au chômage. On peut parler d’une bombe à retardement.

Si les réformes se limitent à remplacer un président comparable au demi-mort d’un « Week-end at Bernie’s », les manifestations se transformeront bientôt en violence.

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