“S’il faut choisir une année particulière pour une grande crise inattendue… Ce sera 2018”

 « 2018 ne se présente pas bien », écrit Ian Bremmer, président de Eurasia Group et auteur du premier indice de risque politique à Wall Street, dans son rapport « Top Risks » pour cette nouvelle année. Bremmer est un observateur respecté des relations diplomatiques.

« Oui, les marchés boursiers sont en forte hausse et l’économie ne se porte pas mal, mais nos citoyens sont divisés. Les gouvernements ne gouvernent pas beaucoup. Et l’ordre mondial se délite. (…) Depuis que nous avons fondé Eurasia Group il y a 20 ans, l’environnement mondial a eu ses hauts et ses bas. Mais si nous devions choisir une année particulière pour une grande crise inattendue – on dirait que ce sera 2018. Désolé ».

« L’année dernière, nous avons écrit que le monde était entré dans une période de récession géopolitique. (…) Le monde est maintenant plus proche d’une dépression géopolitique que d’un retour à la stabilité récente ».

Les 10 risques les plus notables soulignés par Bremmer et ses collègues peuvent être résumés ainsi :

  1. Alors que la Russie cherche à détruire l’ordre mondial existant et que l’Europe se fait discrète, le déclin de l’influence américaine dans le monde va s’accélérer en 2018. La Chine va tenter de tirer profit du vide qui est apparu désormais. Jusqu’à l’année dernière, la Chine avait évité de parler de leadership mondial, mais désormais, le pays établit des normes internationales [en matière de commerce et d’investissement, de technologie, de valeurs et de sécurité] avec moins de résistance que jamais.
  2. Il est impossible d’ignorer le risque d’une crise majeure. Il y a en effet trop d’endroits où un faux- pas ou une mauvaise évaluation de la situation pourrait déclencher un conflit international grave.
  3. Une guerre froide mondiale en termes de technologie. La dernière vague d’innovations se produit à une ère de tensions généralisées au sein de l’Internet et des sphères technologiques qui joueront un rôle important en 2018.
  4. L’érosion de nos institutions. Il y aura plus de conflits, la prise de décision est en train de perdre de l’importance et le chaos interne est la règle plutôt que l’exception. La confiance dans les médias et la politique est partout en déclin, le sentiment anti-establishment augmente et il y a un risque croissant de troubles sociaux et politiques imprévisibles.
  5. Un renforcement du protectionnisme. Les mouvements anti-establishment ont forcé les législateurs à pivoter vers une approche plus mercantiliste à l’égard de la concurrence économique mondiale. Des murs sont construits

« 2017 aura été elle aussi la meilleure année de l’histoire de l’humanité »

Dans le Financial Times, Gideon Rachman voit tout autre chose ( «The case for optimism in 2018» ) :« après une trajectoire lamentable dans le domaine de la politique mondiale, il est certainement temps de se souvenir qu’il peut aussi bien y avoir de bonnes surprises que de mauvaises. Ma propre résolution pour la nouvelle année sera de tenter d’échapper à la sinistrose induite par Trump et le brexit.Dans cet esprit, je prédis que la plupart des gros risques qui inquiètent actuellement les experts ne se produiront pas.Il n’y aura pas de guerre sur la péninsule coréenne, de même qu’il n’y en aura pas dans la mer de Chine du Sud ou en Europe de l’Est. L’UE ne s’effondrera pas, les négociations du brexit ne seront pas suspendues et les marchés ne s’effondreront pas. En revanche, il y aura des changements positifs d’importance au Moyen – Orient. … »Quant à David Leonhardt du New York Times, il nous rappelle que 2017 a été elle aussi la meilleure année de l’histoire de l’humanité. « Les gens n’ont jamais vécu aussi longtemps, aussi bien ou aussi librement.»